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Covid-19 & Sécurité alimentaire - Le revenu de base d'urgence sera-t-il suffisant pour assurer l'accès à la nourriture des plus vulnérables au Brésil ?

Une impasse est apparue entre le Président de la République et les gouvernements locaux depuis le début de la crise sanitaire avec Covid-19 au Brésil. La propagation rapide de l'épidémie dans le pays a conduit plusieurs gouverneurs et maires de grandes villes à adopter des mesures de confinement plus restrictives. Dans le sens inverse, le président de la République, Jair Bolsonaro, a stimulé le retour des activités économiques et l'isolement sélectif orienté vers les groupes à risque. La stratégie d'isolement social adoptée par les gouvernements locaux jusqu'au moment a reçu le soutien du pouvoir judiciaire. Cependant, certains gouverneurs ont déjà commencé à céder aux pressions, comme c'est le cas de l'État de Santa Catarina, qui a décrété la réouverture du commerce non essentiel à partir du 22 avril.
Les populations pauvres sont les plus touchées
Les mesures d'isolement ont eu un impact sur les revenus d'une grande partie de la population, en particulier ceux liés aux activités informelles, qui couvrent 40 % de la main-d'œuvre brésilienne. Dans un pays où 13,5 millions de personnes vivent dans l'extrême pauvreté (moins d'un dollar par jour), toute baisse de revenu dans le secteur informel entraîne une aggravation rapide de la faim. Non limités aux zones urbaines, certains travailleurs ruraux, pêcheurs et agriculteurs connaissent également une baisse de revenus due à la fermeture de divers circuits de commercialisation.
En l'absence ou en cas de retard des actions de protection sociale des gouvernements, notamment du gouvernement fédéral, les populations les plus pauvres se trouvent rapidement confrontées à un dilemme : être confinées et se retrouver dans une situation de pauvreté et de faim, ou continuer à travailler et s'exposer au risque de contamination, dans un pays dont les difficultés d'accès à la santé sont également importantes dans certains contextes.
Entre difficultés d'accès et politiques publiques insuffisantes
Pour compenser la forte baisse des revenus des plus pauvres, plusieurs gouvernements locaux ont rapidement adopté des mesures d'urgence, principalement par la distribution de paniers alimentaires de base. Cependant, bien que fondamentales, ces mesures sont insuffisantes pour répondre à la demande alimentaire croissante. En outre, la distribution centralisée de grandes quantités de paniers peut générer des agglomérations, exposant les populations au risque d'infection par le virus.
Ainsi, la nécessité d'un revenu de base d'urgence pour les populations liées au marché informel est rapidement entrée dans l'agenda public. Un projet de loi, voté le 2 avril, a établi le transfert de R$ 600,00 (environ 110 euros) par personne (R$ 1.200,00 par famille) pendant trois mois aux travailleurs informels et aux micro-entrepreneurs dont les revenus individuels sont faibles. Cependant, la loi n'a été signée par le Président de la République que le 7 avril. Avec une longue mise en œuvre, à partir du 9 avril, les plus pauvres n'ont pas eu d'autre choix que de descendre dans la rue à la recherche de revenus pour survivre, ce qui a augmenté le risque de propagation du virus.
De plus, l'accès à un revenu de base d'urgence n'est pas facile, surtout pour les populations rurales. Pour accéder cette politique publique, il est nécessaire d'être lié à un registre d'assistance sociale ou de disposer d'autres documents justificatifs. L'accès se fait par le biais d'une application ou d'un site web spécifique, par un accueil présentiel dans les loteries ou les agences bancaires (Caixa Econômica Federal). De telles conditions et exigences constituent des obstacles pour de nombreux groupes sociaux, dans un contexte où l'aide sociale elle-même a été démantelée ces dernières années.
Des mesures d'urgence complémentaires pourraient être adoptées par les gouvernements infranationaux, comme le gouvernement du Maranhão, qui a intensifié l'achat de denrées alimentaires provenant de l'agriculture familiale pour composer des paniers alimentaires de base qui sont distribués aux populations les plus pauvres ou qui sont transformés en repas dans les restaurants populaires.
En plus de ces mesures, la crise offre l'opportunité de débattre du problème structurel de l'inégalité au Brésil. Des sociologues, comme Arilson Favareto, soulignent qu'il serait opportun de repenser le rôle de l'État, de procéder à des réformes fiscales et de changer le modèle économique qui reproduit tant d'inégalités. Cependant, de telles mesures sont loin d'être à l'ordre du jour du gouvernement Bolsonaro. Les mouvements sociaux - en particulier les mouvements sociaux ruraux, ceux qui luttent pour la réforme agraire et ceux liés aux questions sociales et à la sécurité alimentaire et nutritionnelle - pourront-ils conduire à la construction d'un nouveau contrat social ? Il est difficile à prévoir dans la société brésilienne, si divisée en termes politiques, sociaux et économiques.